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Soludec construit tout ce dont la société a besoin

Laurent / Publié le 17:03 12.07.2022


Soludec SA, entreprise générale de construction dans les secteurs du bâtiment, du génie civil et des ouvrages d’art, agit également comme promoteur immobilier et développe des ensembles résidentiels de standing et des bureaux. Depuis deux ans, l’entreprise a changé d’actionnaire en procédant par un Management-buy-out (MBO). Rencontre avec Jacques Brauch, son Administrateur délégué.

SOLUDEC - LOTISSEMENT TERRAROSES BERELDANGE

Aujourd’hui, comment vous situez-vous dans ce secteur de la construction au Luxembourg?

Faire partie des leaders sur le marché luxembourgeois signifie que nous devons répondre à toutes les demandes que l’on reçoit, quel que soit le type de bâtiment. Je résume souvent notre travail en une phrase: Soludec construit tout ce dont la société a besoin, sauf les routes. Des logements, des bureaux, des bâtiments publics, des ponts, des tunnels, des écoles, des stations d’épuration, etc… Depuis deux ans, la société a été reprise par les membres de sa direction en «Management Buy-Out» (MBO). On évolue bien, le chiffre d’affaires ayant même augmenté. Pour nos clients comme pour nos partenaires et collaborateurs, rien n’a changé au quotidien. Mais la nouvelle moins réjouissante, c'est que l 'activité des investisseurs privés a été ralentie ces deux dernières années. La pandémie, la guerre et maintenant l’inflation entraînent des hésitations chez les clients potentiels. Les investisseurs réfléchissent trois fois avant de passer une commande. Ça rend donc le processus plus long et plus compliqué puisqu’il faut étudier des variantes multiples qui s’ajoutent au projet.

Pourtant, on a l’impression que le Luxembourg est en chantier permanent tant les constructions sont nombreuses…

Oui, il y a du travail. Mais s’il est vrai que les clients passent toujours des commandes, que les projets sont multiples et qu'il y en a énormément dans les tiroirs chez les investisseurs privés, les Communes ou les Travaux Publics, il y a une grande conséquence à la suite de ces crises: du retard dans les décisions et un budget qui explose. Je pense bien évidemment au surcoût des matériaux de construction et de l'énergie.

SOLUDEC - Jacques BRAUCH

Avec l’augmentation du prix des matériaux justement et parfois, des retards de livraison, on imagine que ce ne doit pas toujours être facile avec les clients…

Il arrive effectivement que nos clients freinent leur investissement car leur budget est dépassé. Mais c’est tout à fait normal. Pourquoi? Parce que généralement, leur budget a été calculé deux ou trois ans avant, mais la hausse des prix des matériaux chamboule la donne. Nous n’y pouvons rien. Prenons l’acier qui est vraiment le matériau qui pose problème. Son prix a augmenté de 70% en quelques mois. On l’utilise dans le béton armé et dans les charpentes métalliques. On ne peut donc pas s’en passer. Trouver d’autres fournisseurs? Non, c’est impossible. Nos sous-traitants suivent l’évolution du prix mondial. Tenter de chercher de nouvelles sources qui proposent des prix plus attractifs, ça n’existe pas. Cette situation est vraiment inquiétante et menaçante.

“Menaçante”?

Oui. Certains sous-traitants refusent même des chantiers, car ils perdent de l’argent s’ils les acceptent. Je les comprends et je ne peux leur en vouloir. Nous aussi, il nous arrive parfois de devoir nous abstenir si dans nos calculs, on constate une perte conséquente. C’est une décision difficile à prendre, mais elle peut s’avérer salutaire pour l’entreprise. Parfois, il vaut mieux perdre le marché et assurer la pérennité de Soludec. De leur côté et vu le budget qui diffère, les clients tentent de trouver des solutions pour réduire les coûts. Ils retournent donc vers leur architecte pour finalement soumettre un projet modifié. Toutes ces démarches prennent du temps. Le retard est inévitable, certains projets sont abandonnés. Bref, la situation n’est pas agréable pour tout le monde.

Qu’est-ce qui vous tracasse le plus dans la crise du logement que traverse le pays?

Ce n'est pas le manque de terrain, la densité de la population est faible au Luxembourg, mais le manque de terrain constructible! C’est une décision politique de ne pas permettre la construction n’importe où et c’est très compréhensible. Par contre, l’explosion démographique est connue. Ça représente environ 6 000 habitations à construire chaque année. Or, nous en réalisons la moitié. Il faut donc trouver des solutions à long terme en commençant par augmenter la densité des constructions (nombre/hectare). La tendance actuelle est aussi de voir les propriétaires de terrain hésiter et attendre avant de vendre. La plus-value est certaine et je comprends leur comportement. Il y a donc une question politique, mais aussi philosophique à se poser si on veut que les choses évoluent.

Est-il encore possible de se loger au Luxembourg? On pense notamment à la jeune génération

Evidemment, pour les jeunes, c’est devenu plus compliqué de construire. Il faut bien qu’ils se mettent dans la tête que les maisons 4 façades, c’est fini. On est trop nombreux, la consommation foncière serait exagérée si on construisait de grandes maisons, comme dans le passé. Des alternatives existent. On peut aussi louer un appartement et ne pas devenir propriétaire. Et il y a des structures qui sont là pour aider. Citons notamment la SNHBM et le Fonds du Logement qui proposent l’achat du logement avec un bail emphytéotique.

La situation actuelle semble difficile et pourtant, Soludec a su s’adapter. De quoi être satisfait?

Oui, bien sûr! A côté de notre métier de constructeur, notre activité en tant que promoteur se porte bien. Nous avons quelques chantiers avec des constructions dites “de nouvelle génération” qui seront terminés cette année. La majorité des logements (des appartements en l'occurrence), a déjà trouvé preneur. A Belval par exemple, l’immeuble Manhattan, situé au Square Mile. Ou Bivange, Berchem gare, le lotissement Edward. En interne, nous avons aussi développé la méthode “BauTeam” qui a déjà fait ses preuves lors de certains chantiers: par exemple, l’immeuble occupé par Telindus/Proximus à Bertrange, l’hôtel MamaShelter et bureaux au Kirchberg ou encore la transformation de l’usine Heintz von Landewyck à Hollerich en bureaux. Une avancée dans notre méthode de travail et approche client.

Un BauTeam, qu’est-ce que cela signifie?

D’ordinaire, un maître d’ouvrage fait appel à un architecte pour la conception du projet, les plans d’exécution, les bordereaux ainsi que pour le contrôle de l’exécution. Dans la procédure “Bauteam”, le maître d’ouvrage conclut directement avec l’entrepreneur un contrat d’entreprise, basé sur les plans de l’architecte. Le BauTeam pourrait se résumer en un “accélérateur de projet”. En pratique, c’est un contrat de prestation de services consistant à collaborer et assister le maître de l’ouvrage durant la phase de conception. Fondamentalement, le BauTeam consiste, pour chacun des partenaires, à apporter ses connaissances propres afin de déterminer le projet et à désigner les sous-traitants. Le but est de prévenir les difficultés qui pourraient survenir en cours de chantier. Outre l’aspect technique, le BauTeam, qui associe l’entreprise générale, l’architecte, le maître d’ouvrage et l’ingénieur, permet de cadrer le budget pour qu’il colle au mieux à la réalité résultant de l’exécution concrète des travaux. Cette méthode a comme résultat un raccourcissement du délai et presque toujours des économies financières pour tous les intervenants.